Nora Piriou

 « Alors, comment ça va depuis la dernier fois ? » demanda-t-elle.
 Nora resta muette. Il n'y avait rien à dire. Rien n'avait changé. Pire, ça empirait. Remarquant à son silence qu'elle ne répondrait pas, elle ajouta :
 « Je sais que tu as des facilitées à l'écriture, tu devrais essayer de leur écrire une lettre. Tu dirais dedans combien tu les aimes et tu leur expliquerais que tu ne supporte plus la situation. »
L'adolescente resta silencieuse retenant des larmes. La psychologue scolaire ne comprenait rien. Elle ne comprendrait sans doute jamais. Elle haïssait ses parents. Elle ne les aimait pas. Tout ce qu'elle voulait, c'était que quelqu'un arrive à les convaincre d'arrêter. Mais pourquoi c'était toujours à elle qu'on demandait ?! Elle n'avait jamais réussi à les faire arrêter, tout ce qu'elle demandait, c'était de l'aide, mais personne ne l'écoutait. Même ceux qui étaient payés pour le faire.
 La jeune fille avait grandit dans une famille que certains considère aujourd'hui encore comme une famille « modèle ». C'est du moins, se que les parents de la jeune fille font croire aux proches et aux voisins. Pourtant, depuis trois ans, la perfection avait laissé place au cauchemar. Tout avait commencé par la mort de sa jeune sœur, tuée dans un accident de voiture. Son père était au volant, et un chauffard les avaient percutés. Quelques jours plus tard, elle mourrait de ses blessures, tandis que leur père s'en sortait sans problème. Depuis ses parents sont devenus alcoolique, noyant leurs chagrins dans un verre remplit de liqueur.
 D'ailleurs, si il y avait bien une chose qu'elle avait apprit d'eux, c'était de toujours choisir la facilitée au bien. Après tout, les parents étaient des exemples pour les enfants. Eux, avaient choisit d'oublier. Alors elle aussi, elle en avait le droit. Et puis, essayer de tout effacer, c'est tellement plus facile que de vivre avec l'idée qu'on ne reverra jamais la seule personne à laquelle on tient vraiment.
 Alors, elle c'est mise en tête de trouver un moyen efficace de ne plus penser à ELLE. Un moyen d'oublier, de se noyer, de se perdre. Mais sans en venir à l'alcool. Elle ne voulait pas devenir comme eux, ronger par ça. Comme les « parents de la nuit ». C'était comme ça qu'elle les appelait quand ils buvaient. Quand ils étaient sobre, c'était les « parents du jour » parce que c'était uniquement en journée, quand ils devaient travailler ou recevoir du monde qu'ils étaient normaux.
 A force de chercher, elle a finit par trouver une méthode. La musique. Ça envahit la tête, la remplit par vague, et finit par tout emporter ailleurs, dans un monde où ça ne lui fait plus mal, où rien ne peut l'atteindre... Mais parfois, sans qu'elle le souhaite, les souvenirs reviennent sans prévenir, malgré la musique.

 Un jour, elle prit la décision de partir. Pas longtemps et pas bien loin. Juste assez pour ne plus les entendre, juste assez pour ne pas regretter. Ce ne fut pas très compliqué, sa chambre étant au rez-de-chaussé, elle pu passer par la fenêtre sans problème. Une fois dehors, l'air du soir emplit sa gorge de fraîcheur et les parfums estivaux emplir ses narines. Elle courut, aussi vite qu'elle pu, jusqu'à ce que c'est jambes la trahissent et ne purent enchaîné un pas de plus. Elle ne pensait plus à rien, son esprit semblant la quitter et s'échapper dans la nuit. Ses mains couvertes d'écorchures ne la faisait point souffrir, au contraire. La vie semblait reprendre possession de ce corps qui la cherchait depuis deux ans.
 C'est alors, qu'elle l'a vit. Cette petite boîte, au milieu du chemin. Elle se releva et s'approcha d'elle avec un peu de méfiance, avant de la soulever pour mieux l'observer. Noir et blanche, elle était très jolie. Son regard bleu regarda aux alentours, cherchant son propriétaire. Ne voyant personne, elle finit par l'ouvrir, sans apercevoir la petite fille, un peu plus loin, qui l'observait d'un air ravi.